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Guitar power

Pour un « Guitar power »

La guitare a connu, selon les époques, un intérêt variable. Pendant longtemps, elle était assujettie à la chanson: on était guitariste lorsqu'on voulait chanter Brassens et que l'on connaissait quatre accords... et demi. Les choses ont changé avec l'arrivée des Shadows et autres groupes similaires comme les Ventures, qui ont surtout connu le succès en Amérique, tandis que les Shadows bousculaient l'Europe. Cela se passait vers 1960.

Peu nombreux étaient les chanceux qui entendirent parler d'un jeune guitariste nommé Chet Atkins, l'homme qui faisait à lui tout seul le travail de deux ou trois de ses collègues. Je n'étais malheureusement pas du nombre des initiés. Comme tout le monde, je subissais ce dont on voulait bien m'abreuver à la radio, à la télévision et dans la presse spécialisée. Encore n'y avait-il pas trop à se plaindre, puisque la figure réellement dominante du temps était la guitare et que son règne laissait une empreinte indélébile dans l'esprit de tous.

A l'arrivée des Beatles, il semblait incroyable qu'un groupe inconnu puisse rivaliser avec les Shadows : surtout des chanteurs! Hélas pour les Shadows, les Beatles ne partagèrent même pas le gâteau, ils l'enlevèrent. Et des Shadows, il ne resta bientôt plus qu'une nostalgie profondément marquée dans les coeurs. Tout cela, bien sûr, résultait de la dure loi des antennes, où les désirs de l'audience sont des ordres et où les cases horaires ne peuvent se multiplier à l'infini. Merci aux anciens et place aux nouveaux. Heureusement pour nous, les Beatles étaient bons et le restèrent.

Puis, ce furent les Stones, les Kinks, les Yardbirds, Eric Clapton et Jimi Hendrix, les Who...

Nous avions toujours la chance que la guitare soit encore et toujours la messagère de la musique à la mode. En effet, en dehors du batteur, tous les membres des groupes en question étaient soit bassiste, soit guitariste, même si avec Hendrix et Clapton (dans le groupe Cream), on assistait à la disparition du guitariste d'accompagnement. Notre grande frayeur vint avec la vague de l'orgue, dont les tenants avaient pour noms Alan Price, Brian Auger, Rhoda Scott. Tout le monde s'y mettait et l'orgue était indispensable aux groupes de l'époque. L'instrument « fit son trou », en attendant le déferlement de la grande vague des synthétiseurs.

Et nous, amoureux éperdus de la guitare, nous étions «en manque » par le fait des modes dont les disc-jockeys, programmateurs télé ou radio, doivent bien tenir compte. Ajoutez à cela que, de toute évidence, certains animateurs d'émissions de télévision ne font sûrement pas la différence entre la guitare en tant qu'instrument joué et la guitare décorative. Peut-on prétendre que Ringo joue de la guitare parce qu'il en tient une et fait semblant d'en jouer en mimant avec perfection le chorus enregistré par un autre en studio ? Passons. Il reste que notre instrument favori est sous-représenté sur les ondes.

Alors, ne nous faut-il pas nous prendre par la main et faire ce que font tous ceux qui veulent que ça change ? Il ne suffit pas de m'écrire pour me dire : C'est dommage que ceci ou cela ». Il ne faut pas davantage écrire vos doléances aux autres artistes, car nous sommes dans l'impossibilité totale d'apporter un changement, si minime soit-il, dans l'orientation des programmes radio ou télé. Vous devez plutôt écrire directement à TFl, à A2 ou FR3, à France Inter, à Europe 1, à RTL, à RMC, à Radio 7, aux revues de télévision, en demandant, par exemple, la création d'une émission hebdomadaire, bimensuelle ou même mensuelle consacrée entièrement à la guitare (j'ai moi-même déposé naguère un projet de ce genre, mais, en l'absence d'appuis extérieurs, il est tombé dans l'oubli). Écrivez pour demander courtoisement que l'on passe plus souvent tel ou tel musicien que vous aimez particulièrement et que l'on ne voit jamais ou presque à l'écran. Téléphonez à la radio aussi souvent que vous le pouvez pour demander les morceaux que vous préférez.

Ainsi, avec nos efforts conjugués, peut-être la guitare prendra-t-elle la place qu'elle mérite dans tous les programmes. L'important est que les médias prennent conscience que nous existons et que nous sommes nombreux. A la radio et à la télévision, quelques animateurs acquis à la cause de la guitare n'attendent peut-être que vos appels pour pouvoir ramener leur science » auprès de directeurs toujours sensibles à la "vox populi". Alors, essayons...

Marcel Dadi