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Premier Contrat: Attention!

Qui ne rêve de devenir professionnel et de faire un premier disque ? Malheureusement, très peu d'entre nous savent rêver les yeux ouverts et il est pourtant indispensable de rester lucide lorsque, la chance aidant, on vous présente le fameux contrat qui vous liera pendant une durée de 2, 3, 5 ou 7 ans avec votre maison de disques. Ce contrat se présente la plupart du temps sous une forme stéréotypée, imprimé sur un feuillet double en petits caractères. Rien n'y est oublié sauf, parfois, votre intérêt...

Bien sûr, un premier contrat ne peut être d'emblée mirifique. Vous vous verrez offrir en général, sur la vente du disque, 5% du prix de gros hors taxes pour un contrat de 3 ou 5 ans. Si vous savez vous débrouiller et si vous avez un réel talent, vous pourrez obtenir assez facilement un taux progressif pour votre royaltie 5, 6 et 7 % sur trois ans, ou encore 5, 6, 7 et 8 % les deux dernières années sur 5 ans. Si vous êtes compositeur, ou auteur (ou les deux), on vous proposera parfois de lier votre contrat d'artiste à un contrat d'édition par lequel vous devrez céder le droit d'édition de toutes vos oeuvres créées pendant la durée du dit engagement. En d'autres termes, lors des répartitions des droits de la SACEM (Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique), vous ne recevrez que 50% de ce qui vous reviendrait normalement, les autres 50% allant à l'éditeur. Sachez donc que vous n'êtes pas tenu de faire éditer vos morceaux (comme on essaiera de vous le faire croire). Si vous n'avez pas d'éditeur, vous percevrez la totalité des droits répartis par la SACEM, soit 100%. Bien souvent, les compagnies de disques n'ont d'éditeur que le nom et feront ainsi office de 'tiroir-caisse' à vos dépens. Un conseil: ne signez de contrat d'édition qu'avec un authentique éditeur, c'est-à-dire avec une personne ou une société qui a déjà fait ses preuves en publiant des ouvrages sur les artistes de leur catalogue ou en faisant jouer leurs oeuvres par d'autres artistes. A vous de juger si les 50 % que vous allez céder peuvent être compensés par les gains potentiels que peut vous garantir l'efficacité de votre éditeur.

Évidemment, les promesses verbales sont rarement concrétisées par les résultats ultérieurs. A vous de demander certaines garanties par contrat. Une de ces garanties peut être tout simplement un accord de gestion temporaire sur deux ans qui vous permette, à la fin de ce délai, de récupérer vos morceaux si vous n'avez pas été satisfait et si vous l'êtes, le contrat de gestion peut être renouvelé par tacite reconduction. Très important: toute votre correspondance avec l'autre partie doit se faire par lettre recommandée avec accusé de réception; vous garderez précieusement le double des lettres (carbone) et le récépissé de la poste.

Une autre clause du contrat vous offrira peut-être, pour les ventes à l'étranger, 50 % seulement de votre royaltie; cela dans le cas où vous signez pour le monde entier. Là encore, rien ne vous oblige à accepter cette disposition. Vous pouvez très bien signer votre contrat uniquement pour le territoire français et éventuellement pour les territoires francophones (Belgique, Suisse, Canada). Pour le reste du monde, vous pouvez concéder une option d'une année après chaque sortie de disque, année pendant laquelle la maison de disques pourra placer ce disque en exploitation dans un pays étranger. Si, au bout de cette année, rien de tout cela n'est fait, vous redevenez alors propriétaire de votre enregistrement pour l'étranger (ou dans les pays non exploités). Ce qui vous permettra de tenter votre chance dans ce domaine avec d'autres partenaires.

Votre contrat vous empêchera, entre autres, d'enregistrer les titres déjà enregistrés pendant 15 ans après leur parution et cela même si votre contrat est terminé (sauf si vous le renouvelez dans la même maison). Vous pouvez faire réduire ce délai ou tout simplement faire annuler cette clause.

Une autre chose très importante : ne concédez pas à la maison de disques le droit d'exploiter vos enregistrements en ;budget-line;, c'est-à-dire en les incluant dans une série vendue à prix très bas. Exigez par contrat d'être consulté à ce sujet et que votre décision l'emporte sur toute autre. L'opportunité de ce genre d'opération doit être laissée à votre seule appréciation.

Un autre point qu'il peut être intéressant d'obtenir par contrat : le paiement trimestriel de vos royalties. En général, il est effectué tous les six mois, mais ce mode de paiement, s'il simplifie le travail de la maison de disques vous laisse démuni pendant une très longue période (tandis que votre loyer, lui, est mensuel). Les paiements de la SACEM et de la SDRM (cette dernière gérant les droits de reproduction mécanique) se faisant tous les trois mois en alternance (4 avril, 4 juillet, 4 octobre, 4 janvier), essayez d'obtenir les paiements de la maison de disques pour fin février, fin mai, fin août, fin novembre. Ainsi, votre budget sera plus équilibré.

La promotion, elle aussi, peut faire l'objet d'une clause spéciale. Vous pouvez demander qu'elle figure sur le contrat sous la forme d'un pourcentage sur votre chiffre d'affaires annuel (nombre de disques vendus multiplié par le prix de chaque disque hors taxes). Évidemment, ce pourcentage devra être un minimum garanti. Attention! Spécifiez bien que cette promotion, garantie par contrat, n'englobe que les efforts de marketing (promotion chez les disquaires, publicité dans la presse); car d'un autre côté, la promotion gratuite, télévision, radio, magazines, etc., doit de toute façon être assurée par les services public relations de la maison de disques. Si vous savez vous débrouiller, vous pourrez ainsi obtenir que l'on ne vous facture pas les affiches utilisées en province, même celles offertes gracieusement à chaque concert. A vous de ne pas abuser...

Voilà. Si vous aviez des questions à me poser, par la voie du magazine, sur ces problèmes, je me ferai un plaisir d'y répondre dans la mesure de mes possibilités. A bientôt!

Marcel Dadi